Trois raisons pour lesquelles Microsoft n'a pas à craindre DeepSeek

Satya Nadella, le dirigeant de Microsoft, estime que les gains d'efficacité que DeepSeek a su générer dans la construction de l'IA stimuleront en fin de compte les résultats financiers de la firme de Redmond. (Illustration : Dall.E)

Satya Nadella, le dirigeant de Microsoft, estime que les gains d'efficacité que DeepSeek a su générer dans la construction de l'IA stimuleront en fin de compte les résultats financiers de la firme de Redmond. (Illustration : Dall.E)

Satya Nadella, dont l'entreprise a investi des milliards dans l'IA générative, a qualifié l'arrivée de DeepSeek de « bonne nouvelle ».

Le mois dernier, le monde de la technologie a été frappé de plein fouet par le lancement de la dernière version du robot chinois d'IA générative DeepSeek, développé avec seulement 6 millions de dollars, soit bien moins que les centaines de milliards de dollars que Microsoft, Google, OpenAI, Meta et d'autres ont consacrés à l'IA générative. L'onde de choc a été immédiate : Les actions des entreprises de GenAI ont plongé, voyant leur valeur cumulée perdre plusieurs centaines de milliards de dollars du jour au lendemain. De nombreux pronostiqueurs ont avancé que DeepSeek saperait la domination de l'Amérique dans l'IA générative et menacerait les grandes entreprises, notamment Microsoft. Grâce à son leadership dans l'IA, la firme de Redmond affiche une capitalisation boursière de 3 000 Md$. De fait, c'est peut-être l'acteur ayant le plus à perdre avec l'arrivée de DeepSeek. L'éditeur a déjà investi des milliards de dollars dans l'IA et il a annoncé que, sur la seule année 2025, il investirait 80 Md$ supplémentaires dans cette technologie. Si, comparativement, le chatbot DeepSeek a été construit avec aussi peu d'argent, il y a donc lieu de se demander si Microsoft n'est pas en train de gaspiller des milliards de dollars et s'il pourra rivaliser avec une entreprise capable de construire une genAI à un coût aussi bas. A bien y réfléchir, trois raisons permettent de répondre que le géant du logiciel n'a rien à craindre de DeepSeek et que l'entreprise chinoise pourrait même l'aider.

Les économies relatives de DeepSeek

L'affirmation de DeepSeek selon laquelle la dernière version de son chatbot a été développée avec 6 M$ est étonnante, compte tenu des sommes investies dans le développement de l'IA et dans l'infrastructure connexe par de nombreuses autres entreprises. C'est d'autant plus surprenant que le chatbot semble être techniquement au même niveau que ChatGPT d'OpenAI, qui est à la base de Copilot de Microsoft. En réalité, l'affirmation de DeepSeek est extrêmement trompeuse. En se fondant sur les informations fournies publiquement par le créateur chinois, l'entreprise de recherche et de conseil en semi-conducteurs SemiAnalysis s'est penchée sur les coûts réels du développement du chatbot. Elle a constaté que les 6 M$ ne représentaient « que le coût du GPU pour le pré-entraînement, qui n'est qu'une partie du coût total du modèle », précisant que « sont exclues des pièces importantes comme la R&D et le coût total de possession du matériel lui-même ».

SemiAnalysis a constaté que les coûts du matériel dépassaient largement le demi-milliard de dollars. Elle estime que le total des dépenses d'investissement pour le matériel, y compris les coûts d'exploitation, s'élève à environ 1,6 Md$. De plus, OpenAI affirme que DeepSeek pourrait avoir utilisé illégalement des données créées par OpenAI pour entraîner son modèle. Le coût d'obtention des données d'entraînement peut s'élever à des milliards de dollars. On ne sait pas combien DeepSeek aurait dû dépenser si l'entreprise n'avait pas utilisé les données d'OpenAI. Même s'il est probable que DeepSeek a dépensé beaucoup moins qu'OpenAI, Microsoft et ses concurrents pour construire son modèle, ses coûts se chiffrent probablement en milliards de dollars et ne se limitent pas aux 6 M$ annoncés. Et il n'est pas du tout certain que DeepSeek puisse gagner suffisamment d'argent pour maintenir son rythme de dépenses.

Des craintes sur la vie privée, la sécurité et la censure chinoise

Réaliser des économies, c'est bien. Mais la plupart des entreprises attachent encore plus d'importance à la confidentialité et à la sécurité de leurs données et de leurs activités, ainsi qu'à la confidentialité et à la sécurité des données de leurs clients. Le Congrès a adopté une loi interdisant l'accès de TikTok aux États-Unis, car il craint que des données soient collectées sur les utilisateurs de l'application et renvoyées en Chine. (Le président américain Donald J. Trump a temporairement suspendu cette interdiction.) Mais la valeur du type de données que TikTok pourrait collecter et renvoyer en Chine est dérisoire par rapport à celle du type de données que DeepSeek pourrait envoyer. TikTok permet simplement aux utilisateurs de publier et de regarder des vidéos. Le chatbot genAI de DeepSeek a accès aux données personnelles, commerciales et financières sensibles des entreprises et des particuliers qui l'utilisent.

La politique de confidentialité de DeepSeek admet d'emblée qu'elle envoie des données commerciales et personnelles en Chine, en précisant : « Nous stockons les informations que nous recueillons dans des serveurs sécurisés situés en République populaire de Chine ». Il est ajouté « nous pouvons collecter vos entrées textuelles ou audio, vos invites, vos fichiers téléchargés, vos commentaires, votre historique de chat ou tout autre contenu que vous fournissez à notre modèle et à nos services ».

Le magazine Wired ajoute que « DeepSeek affirme qu'il recueillera des informations sur l'appareil que vous utilisez, votre système d'exploitation, votre adresse IP et des données telles que les rapports sur les plantages. Il peut également enregistrer vos « habitudes et rythmes de frappe ».

Que pourrait faire DeepSeek de toutes ces données ? Les entreprises chinoises sont tenues par la loi de leur pays de communiquer toute information à leur gouvernement lorsque celui-ci en fait la demande. Il est peu probable que les entreprises américaines veuillent ainsi exposer leurs données au gouvernement chinois.

En outre, DeepSeek refuse de répondre à certaines questions et fournit de la propagande chinoise face à certaines requêtes, selon le New York Times. Les entreprises ne veulent certainement pas devenir les bras armés des efforts de propagande du gouvernement chinois.

Les entreprises veulent une intégration de l'IA dans les outils de l'entreprise

Ce que les entreprises attendent avant tout des outils d'IA générique, c'est qu'ils augmentent leur productivité. Pour ce faire, ils doivent s'intégrer à leurs applications, à leurs outils et à leur infrastructure. C'est exactement ce que fait Microsoft avec toute sa gamme de produits Copilot, y compris Microsoft 365, OneDrive, SharePoint, Teams, GitHub, la plateforme CRM et ERP de Microsoft, Dynamics 365, et d'autres.

DeepSeek n'offre rien de comparable à ce type d'intégration. Et sans cela, DeepSeek n'est pas susceptible de faire beaucoup de progrès face à Microsoft - même si elle peut vendre son chatbot moins cher.

Microsoft lui-même ne semble pas s'inquiéter, du moins publiquement. Son PDG, Satya Nadella, pense même que les gains d'efficacité que DeepSeek a su générer dans la construction de l'IA stimuleront en fin de compte les résultats financiers de la firme de Redmond. « Ce type d'optimisation signifie que l'IA sera beaucoup plus omniprésente », a-t-il déclaré à Yahoo Finance. Pour un hyperscaler et un fournisseur de plateforme PC comme nous, c'est une bonne nouvelle. »

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