Les stratégies des fournisseurs SaaS pour s'intégrer les uns les autres

Les Chief Product Officer de Box, Slack, Pager Duty et Zoom. (Crédit: Computerworld UK)

Les Chief Product Officer de Box, Slack, Pager Duty et Zoom. (Crédit: Computerworld UK)

Les chefs de produit doivent à la fois tenir compte de la demande des utilisateurs, mais éviter que leur offre ne se transforme en monstre de fonctionnalités.

Au cours de la dernière décennie, l'industrie du logiciel a connu plusieurs changements importants. Déjà, le passage d'un écosystème sur site à un écosystème basé sur le cloud a modifié les habitudes d'achats des utilisateurs. Ensuite, beaucoup d'entreprises choisissent désormais de créer leur propre pile en sélectionnant « les meilleurs outils » au lieu de tout acheter chez le même fournisseur. La semaine dernière, quatre chefs de produit des fournisseurs de logiciels SaaS Box, PagerDuty, Zoom et Slack se sont réunis dans les bureaux californiens de PagerDuty, la plate-forme cloud de réponse aux incidents SaaS pour les services IT, pour évoquer les défis liés au design de produits. Aujourd'hui, les attentes des clients sont plus élevées que jamais et la multitude des choix rend les produits monolithiques moins pertinents.

L'intégration est le mot qui revient le plus dans cet échange entre les quatre chefs de produit. Comme l'a déclaré Jonathan Rende, vice-président produit senior de PagerDuty, « nous ne sommes pas seulement des partenaires, mais aussi des clients de nos produits respectifs ». Un point de vue très partagé par les quatre participants, qui s'accordent à dire que s'ils fournissent à leurs utilisateurs des moyens d'intégrer les logiciels de leurs pairs dans leur propre produit, ce ne peut être qu'une bonne chose pour l'utilisateur final et pour les résultats financiers de l'entreprise. « Si la fonction d'un des produits offre une meilleure approche, autant l'intégrer plutôt que d'essayer de la développer nous-mêmes », a expliqué Jeetu Patel, chef de produit chez Box.

Ilan Frank, responsable des produits d'entreprise pour le service de messagerie d'entreprise Slack, est également d'accord sur ce point : « Si votre objectif est de servir l'utilisateur final et de le rendre plus productif, l'intégration est pour nous une une évidence. Nous sommes devenus une plate-forme parce que c'est ce que veulent les employés et les utilisateurs ». Aujourd'hui, on dit souvent que les employés « manquent de temps ». Et, parce que le marché du logiciel est à ce point saturé, les utilisateurs sont en droit d'avoir des attentes élevées. En pointant la rue à l'extérieur, Jonathan Rende fait remarquer que chaque jour à San Francisco, des gens annulent un Uber et commandent un Lyft parce que le chauffeur Uber va mettre deux minutes de plus pour arriver. Selon lui, le monde des logiciels d'entreprise n'est pas différent : l'offre est tellement vaste, que les utilisateurs peuvent modifier leur choix s'ils estiment que la première option ne fonctionne pas comme ils l'auraient voulu. « Si ça ne marche pas tout de suite, vous perdez des utilisateurs », a-t-il déclaré.

Comme les autres intervenants, Nitasha Walia, chef de produit du spécialiste de la visioconférence Zoom, a déclaré que son entreprise était favorable aux intégrations, en particulier parce que l'entreprise est très attentive à l'expérience client. Quant à Jeetu Patel de Box, il a remarqué que l'avènement de plates-formes multi-logicielles avait fait émerger des équipes d'ingénierie entièrement dédiées à la mise sur le marché des meilleurs produits possibles, qui s'intégraient de manière transparente avec les autres produits adoptés au quotidien par leurs utilisateurs finaux. « Que se passe-t-il aujourd'hui quand vous publiez un document dans Slack ? Vous recevez une notification de Box qui vous pose des questions sur les autorisations d'accès », a ajouté Jeetu Patel. « Ce ne serait pas le cas, si nous avions travaillé en vase clos sur cette question. Il faut toujours se demander ce qu'il y a de mieux pour l'utilisateur ».

On ne peut pas toujours avoir ce que l'on veut

Aujourd'hui, il n'est pas rare que les grandes entreprises fassent tourner des centaines d'applications SaaS en même temps. Selon l'enquête 2019 Business @ Work réalisée par la plate-forme de gestion des identités et des accès Okta, les grandes entreprises possèdent en moyenne 163 apps dans leur patrimoine. La disponibilité des produits reste toujours un critère important, mais si le produit ne répond pas aux besoins des utilisateurs finaux, ils iront simplement voir ailleurs. Si bien que les chefs de produit se trouvent souvent dans une situation délicate : ils doivent à la fois répondre aux besoins des clients en leur proposant de nouvelles fonctionnalités, mais ils doivent aussi éviter de détruire leur produit en le surchargeant avec toutes les fonctionnalités que pourraient demander les utilisateurs finaux. « La facilité d'usage l'emporte sur les fonctionnalités », a expliqué Nitasha Walia. « Si les utilisateurs ne peuvent pas utiliser le produit comme prévu, peu importe les fonctionnalités que vous leur proposez, personne ne voudra les essayer ».

Concernant cette surcharge de fonctionnalités, le consensus était clair entre les participants à la réunion de PagerDuty. Jeetu Patel, chef de produit chez Box, a affirmé que si les éditeurs de logiciels ajoutaient toutes les fonctionnalités demandées par les utilisateurs, « ils auraient le pire produit possible ». C'est aussi l'approche adoptée par Nitasha Walia : au moment du lancement de Zoom Phone au début de l'année, quelques clients ont demandé l'ajout de fonctions de fax au produit, une idée à la fois irréalisable et contre-productive. Malgré cela, elle a dit que Zoom prenait le temps de lire tous les commentaires des clients et les tickets d'assistance reçus par l'entreprise, afin de mieux comprendre ce que voulaient ses clients. « Nous sommes très attentifs à la qualité des produits, à la gestion d'entreprise et à la facilité d'utilisation de Zoom dans les espaces physiques », a-t-elle déclaré. « Si une demande ne correspond pas à ces valeurs, nous discutons toujours de l'opportunité d'en tenir compte ou pas ».

Développer pour la majorité des utilisateurs

Selon elle, les responsables produits doivent savoir si les demandes des clients apporteront de la valeur et, en fin de compte, amélioreront l'offre. Si ce n'est pas le cas, elle estime que les entreprises courent le risque de transformer leurs produits en monstre de fonctionnalités et de tellement diluer les fonctions, que ces produits perdront leur utilité. Chaque participant a expliqué qu'il pouvait, sur la base de principes clés, décider quelles fonctions il pourrait ajouter et celles qu'il ne devrait pas ajouter. Pour Jeetu Patel, chef de produit chez Box, l'un des principes fondamentaux pour un produit est de « développer des logiciels horizontaux qui convienne à la majorité des utilisateurs ». « Si des millions d'utilisateurs ne peuvent pas utiliser une fonctionnalité, il ne faut pas la développer », a-t-il déclaré. Quant à Jonathan Rende de PagerDuty, il a conseillé de toujours s'interroger sur l'objectif. « Si vous ne savez pas vers quoi vous allez, vous vous perdrez en route », a-t-il expliqué. « Les demandes qui ne correspondent pas à nos principes sont immédiatement éliminées. La qualité du service reste la priorité numéro un ».

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