Octobre - « Les gérants des Espace SFR sont des salariés de SFR a part entière avec la protection qui en découle »

L'avocat Frédéric Michel est un peu la bête noire de SFR devant les tribunaux. L'homme est à l'origine de la reconnaissance du statut de salarié pour quatre anciens gérants d'Espaces SFR auquel l'opérateur a dû verser des sommes dues à ce titre. Des actions qui risquent de rendre plus difficiles pour SFR de se défaire de ses partenaires comme bon lui semble.

Distributique.com : En 2006, vous obteniez pour la première fois la reconnaissance par la justice du statut de salarié de SFR pour un gérant d'Espace SFR. A ce jour, vous avez obtenu quatre fois gain de cause face à l'opérateur sur des dossiers similaires. Quel est le fondement de votre argumentaire ?

Maître Michel :
L'un des points clés est de faire reconnaître par le tribunal le statut de gérant de succursale d'un dirigeant d'un Espace SFR. L'argumentaire repose sur le fait que le code du travail considère comme gérant de succursale, je cite, toute personne dont la profession consiste essentiellement à recueillir les commandes ou à recevoir des marchandises pour le compte d'une seule entreprise, lorsque ces personne exercent leur profession dans un local fourni et agréé par cette entreprise et aux conditions et prix imposés par cette entreprise. Ce qui est bien le cas des gérants des Espace SFR qui doivent réaliser une très grand part de leurs revenus sur la revente de produits et de services de SFR dans un local dont l'aménagement doit répondre aux critères fixés par l'opérateur. Un autre des fondements sur lequel j'ai basé mes plaidoiries consiste à mettre en lumière le fait que les contrats signés entre SFR et les gérants d'espace SFR ne l'ont été qu'en raison des qualités professionnelles des gérants. Ce point permet d'établir la relation très directe entre les personnes des gérants et SFR, plutôt qu'entre SFR et les entreprises des gérants. Cet argumentaire concourt à faire du gérant d'Espace SFR un gérant de succursale auquel le droit du travail accorde le statut de salarié. Dès lors, les anciens gérants des Espace SFR sont en droit de demander à l'opérateur de s'acquitter de ses obligations d'employeur, comme le paiement d'indemnités de licenciement lorsque contrat d'Espace SFR est rompu par SFR, de paiement de préavis...


Distributique.com : Quid du cas des salariés non gérants des Espaces SFR ?

Maître Michel :
Je n'ai eu l'occasion de défendre qu'un seul cas de ce type. Il s'agissait de celui du conjoint d'un gérant d'Espace SFR. Le tribunal l'a également reconnu comme salarié de l'opérateur avec tous les droits que cela lui ouvrait. Je ne pense pas à avoir à plaider beaucoup de cas de ce type pour la bonne et simple raison que les gérants ont en général perdu la trace de leurs anciens collaborateurs lorsqu'ils prennent conscience que ceux-ci peuvent également se retourner contre SFR.


Distributique.com : Les gérants d'espace SFR qui ont été reconnu salariés de l'opérateur par la justice peuvent-ils attendre d'autres réparations ?

Maître Michel :
Oui, car le statut d'employeur de SFR à des implications qui vont au-delà du paiement de salaires et d'indemnités aux gérants des Espace SFR. Comme tout employeur, SFR doit aussi verser des cotisations sociales, pour les gérants de ses Espace SFR mais aussi pour leurs collaborateurs. Or, puisque SFR ne reconnaît ni les gérants ni leurs collaborateurs comme de salariés, il ne s'est pas soumis à ces obligations. Nous envisageons d'attaquer SFR sur ce point. L'objectif ne sera pas forcément de demander à SFR de rembourser ces charges sociales mais plutôt de le faire condamner pour les préjudices que son manquement a causés aux Espace SFR plaignants. Une bonne partie d'entre eux a fermé boutique après avoir perdu leur contrat avec SFR faute de pouvoir continuer de pouvoir payer les salaires et les cotisations sociales de leurs collaborateurs.


Distributique.com : A votre connaissance, SFR a-t-il changé ses contrats pour ne plus prêter le flanc à de nouvelles plaintes de gérants d'Espace SFR ?

Maître Michel :
Il semble que tout le contraire se soit produit. D'après mes informations, il y a bien eu des modifications dans les contrats des Espaces SFR mais elles renforcent le statut de gérant de succursale de ses partenaires. Par exemple, SFR stipule désormais clairement que le contrat qu'il passe avec un Espace SFR ne l'est qu'en raison de la personne même du gérant. Il semble également que les nouveaux contrats stipulent que si un gérant souhaite revendre ses parts d'un Espace SFR, SFR l'oblige désormais à lui demander l'autorisation. Dans les contrats précédents, SFR demandait juste à être averti pour pouvoir s'opposer à la transaction si ses intérêts étaient menacés.


Distributique.com : SFR prend-il des risques supplémentaires en semblant ne pas modifier ses contrats en fonction des décisions de justice qui ont été rendues contre lui ?


Maître Michel :
Ce qui est sûr, c'est que SFR ne pourra plus dire je ne savais pas. Depuis 2011, l'opérateur est sensé savoir qu'il utilise le statut de gérant de société pour créer une vraie relation de travail avec ses partenaires sans s'acquitter de ses obligations sociales. Quand les Espace SFR entrés dans son réseau de distribution après cette décision vont en partir, il ne pourra plus feindre l'ignorance. Il deviendra alors beaucoup plus facile pour un magistrat de travailler sur le plan de la fraude. Or, une absence de déclaration d'un salarié à la sécurité sociale est une faute grave.

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