Apple se convertit aux puces Intel

Ce n'est pas un conte de fées, a expliqué Paul Otellini, le patron d'Intel, lors de l'ouverture de la conférence développeurs d'Apple à San Francisco. La firme à la pomme a bien décidé de basculer du PowerPC aux processeurs Pentium, une information à l'origine publiée par le Wall Street Journal. Pourquoi une telle bascule ? Pour Steve Jobs, la réponse est simple : Apple n'a pas été à même de tenir les promesses effectuées lors de l'adoption du PowerPC 970 d'IBM et n'a pas franchi comme espéré la barre des 3 GHz. De plus, les roadmaps d'Intel sont bien plus prometteuses que celles d'IBM. Selon Jobs, Intel promet un ratio en performance par watt de 70 pour les années à venir lorsque IBM ne peut garantir qu'un facteur de 15. Le mariage est donc un mariage de raison même si Otellini, lyrique, estime que «le plus innovant des fabricants d'ordinateurs a enfin rejoint le plus innovateur des constructeurs de processeurs»... «Mac OS X a vécu une double vie secrète au cours des cinq dernières années», a expliqué Steve Jobs en révélant l'existence de Mac OS X sur Intel. C'était de toute façon un secret de polichinelle, confirmé du bout des lèvres à plusieurs reprises par les responsables produits américains du système d'exploitation : Apple a toujours maintenu dans ses laboratoires une version de son OS phare sur architecture Intel. L'effort, il est vrai, était minimaliste : la première mouture de l'OS de nouvelle génération d'Apple, Rhapsody, tournait indifféremment sur Mac et PC. Ce que l'on ne savait pas est qu'Apple maintient depuis cinq ans une politique multi-plates-formes pour l'ensemble de ses logiciels. En clair, toutes les applications grand public et professionnelles de la firme existent actuellement dans les laboratoires de la firme à la pomme en version PowerPC et Intel. Faire migrer les applications PowerPC sur Intel L'enjeu désormais pour Apple est de convaincre ses développeurs de faire migrer leurs applications. Lors de sa conférence, Steve Jobs a annoncé que les premiers Mac à base de processeurs Intel seront disponibles en juin 2006. D'ici là, les développeurs Mac OS X sont invités à recompiler leurs logiciels pour Intel. Pour leur faciliter le travail, Apple a adopté l'ancien système d'applications universelles (Fat Binary) cher à NexT. L'environnement de développement maison, Xcode 2.1, l'équivalent chez Apple de Visual Studio chez Microsoft, permettra de générer des binaires contenant à la fois le code PowerPC et le code Intel. De cette façon, la même application tournera indifféremment sur les deux plates-formes. Conscient que tous les développeurs ne pourront pas forcément recompiler leurs applications rapidement et qu'il lui faut préserver l'investissement logiciel de ses clients, Apple a aussi intégré à Mac OS X pour Intel une couche de transcodage permettant aux applications binaires PowerPC historiques de tourner sans modification sur Intel, avec toutefois une légère pénalité en termes de performances. Même si Apple ne communique pas sur le sujet, cette couche «d'émulation», qu'Apple appelle Rosetta, pourrait être le fruit d'un partenariat avec Transitive Technologies, une jeune start-up qui fournit déjà ses outils de transcodage à SGI pour l'aider dans sa transition vers Linux sur Itanium. Des questions en suspens La bascule du Mac sur Intel ne devrait pas avoir de grosses conséquences pour les habitués de la pomme, mais elle ouvre plusieurs questions d'importance sur l'avenir d'Apple. Lors de son keynote, Jobs a ainsi évité de définir ce qu'est exactement un Mac sous Intel. Est-ce un PC très traditionnel avec des spécifications matérielles précises et, dans ce cas, peut-on imaginer Mac OS X devenir un concurrent du futur Longhorn ? ou s'agit-il d'un système verrouillé, vraisemblablement par un système de signature qui interdirait toute apparition de «clones» Mac ? La réponse à ces questions dans les prochains mois devrait être d'importance. Apple prévoit en effet de lancer la prochaine version de Mac OS X, nom de code Leopard, entre la fin 2006 et le début 2007, soit au moment même où Microsoft doit lancer Longhorn. En cas d'adoption d'une plate-forme ouverte, Apple deviendrait un fournisseur d'OS à même de concurrencer frontalement la firme de Redmond.

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