Les éditeurs français boudent la vente indirecte

Seuls 10% des éditeurs interrogés par le Syntec Numérique et EY passent par un réseau de partenaires pour revendre leurs solutions. (Crédit : Syntec Numérique/EY)

Seuls 10% des éditeurs interrogés par le Syntec Numérique et EY passent par un réseau de partenaires pour revendre leurs solutions. (Crédit : Syntec Numérique/EY)

A l'occasion de la publication de son panel des 250 éditeurs français les plus productifs, le Syntec Numérique et EY publient leur traditionnelle étude du secteur. En 2018, les 319 entreprises répondantes ont généré un chiffre d'affaires cumulé de 16 Md€. Sans prendre en compte la croissance des 10 premiers éditeurs - moins importantes que les années précédentes - ces revenus ont augmenté de 18% par rapport à 2017.

C'est paradoxal mais pourtant ce que constatent le Syntec Numérique et EY dans leur 9e Panorama Top 250 des éditeurs de logiciels français : la croissance globale du chiffre d'affaires de ces acteurs a été ralentie par les 10 premiers éditeurs de ce classement. En effet, ces derniers n'ont enregistré que 5% d'augmentation de leurs revenus à eux tous entre 2017 et 2018, alors qu'un an avant ils parvenaient à atteindre 14%. Ainsi, en 2018, les 319 éditeurs français inclus dans le panorama ont généré 16 milliards d'euros, contre 15 en 2017, soit 10% de croissance globale. « Hors Top 10, la croissance sur cette période est de 18% » note Jean-Christophe Pernet, associé EY en charge de l'étude.

Les distributeurs et revendeurs ne risquent cependant pas de voir leurs revenus grossir grâce aux éditeurs... Sur les 192 sociétés ayant répondu à la question, 63% disent passer par un modèle direct pour vendre leurs produits. Seuls 10% indiquent passer par un réseau de distribution, que ce soit sur l'ensemble du panel, les entreprises générant un chiffre d'affaires inférieur ou supérieur à 10 millions d'euros. Un tiers de l'ensemble des répondants indique ne privilégier aucun canal spécifique. « Si les intégrateurs et réseaux de revendeurs sont aujourd'hui encore relativement peu mobilisés par les éditeurs de logiciels, l'analyse par catégorie de chiffre d'affaires laisse à penser que le levier indirect est de plus en plus utilisé par les éditeurs les plus petits », peut-on lire dans l'étude.


En 2018, les 319 éditeurs français répondants à l'étude du Syntec Numérique et d'EY ont généré 16 milliards d'euros de chiffre d'affaires, soit une croissance de 10% ralentie par le Top 10. (Crédit : Syntec Numérique/EY)

Un top 3 inchangé

Le top 3 des éditeurs français reste inchangé : Dassault Systèmes (logiciels de PLM), Criteo (spécialisé du reciblage publicitaire) et Ubisoft (jeux vidéos) se partagent encore et toujours le podium avec 7 ,3 milliards d'euros de chiffre d'affaires cumulé. Avec les autres grands éditeurs réalisant plus de 100 millions d'euros de revenus annuels, ils représentent 11% du panel mais génère à eux seuls 77% des 16 milliards d'euros mentionnés plus haut. L'ensemble du panel est globalement rentable. 78% des éditeurs ont enregistré un bénéfice d'exploitation en 2018, contre 81% en 2017. Et plus l'entreprise est importante plus la rentabilité est au rendez-vous.


Les éditeurs de logiciels parviennent rapidement à l'équilibre financier, notent Syntec Numérique et EY. Sur les 234 entreprises répondantes, celles générant de 0 à 5 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2018 étaient rentables à 73%. Mais c'est aussi la catégorie d'entreprises à enregistrer le plus de sociétés déficitaires (27%). (Crédit : Syntec Numérique/EY)

La clientèle de ces éditeurs est toujours centrée autour du tryptique industrie, banque-assurance et secteur public. Quand au mode de commercialisation privilégié, il s'agit bien sûr du SaaS. Le Syntec Numérique et EY voient une augmentation constante du chiffre d'affaires SaaS depuis trois ans. Le SaaS représente aujourd'hui 37% de l'activité de l'édition française. « Une bascule s'est opérée » assure Gilles Mezari, coprésident du collège Editeurs de Syntec Numérique. « Nous sommes passé d'un marché qui refusait ce modèle à des entreprises qui ne demandent plus que ça aujourd'hui ». Le SaaS est ainsi l'axe prioritaire de développement de près d'un éditeur sur deux. Et dans le détail des caractéristiques des abonnements, ils sont en moyenne annuels et avec un engagement long : 38% des éditeurs commercialisent des abonnements de 3 ans. L'abonnement annuel est privilégié par un autre tiers d'entre eux.

Toujours une pénurie de développeurs

14 777 emplois nets ont été créées l'année dernière selon l'étude. Mais comme chaque année, la quasi-majorité du panel d'éditeurs (87%) a de grosses difficultés pour recruter des talents. Et bien sûr les profils de développeurs sont ardemment recherchés, près de 74% des répondants disent en avoir besoin. Mais M. Mezari ajoute que des métiers spécifiques ou en développement sont aussi très demandés : dans l'UX design notamment, ou le marketing produit. Pour fidéliser leurs salariés, les éditeurs utilisent l'appât du salaire et des primes à 61%. Mais les représentants de Mirakl et Algolia, présents à la présentation de l'étude, indiquent le salaire ne fait pas tout. La culture d'entreprise et la possibilité d'évoluer jouent également. Autre donnée qui n'en finit plus de stagner, la place des femmes dans le secteur. Elles ne représentent toujours qu'un tiers des effectifs globaux des éditeurs. Pas de détails sur les postes qu'elles occupent précisément.

Et d'après ces deux éditeurs, lauréats de trophées remis lors de la soirée organisée par le Syntec Numérique - Mirakl pour sa croissance dans le SaaS et Algolia pour son développement à l'international - si les ingénieurs français sont reconnus à l'international, quand on est une entreprise française il vaut mieux avancer masqué. Pour entrer sur le marché américain, réputé comme très fermé aux entreprises françaises, Algolia a rusé en développant un site vitrine en anglais et en envoyant un de ses gérants vivre à San Francisco pour lancer l'activité localement. La stratégie est « d'obtenir un logo », un client local, qui ouvrira ensuite la porte du reste du marché, puisque les clients français sont méconnus outre-Atlantique. L'étude du Syntec montre que si 54% du chiffre d'affaires des éditeurs français est réalisé à l'étranger, ce sont les entreprises réalisant plus de 100 millions d'euros de revenus qui portent cette internationalisation.

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