La Commission chinoise des affaires du cyberespace bloque la vente de certains produits Micron. (crédit : Micron)
Alors que les restrictions à l'exportation de technologies de fabrications de CPU vers la Chine se multiplient, l'Empire du milieu a décidé de riposter. Dans un communiqué, la Commission chinoise des affaires du cyberespace annonce que certains produits du fabricant américain Micron sont désormais interdits à la vente. Le ministère américain du Commerce s'est opposé à cette décision, estimant qu'elle n'était pas fondée.
Le fabricant de composants américain Micron subit les foudres du gouvernement chinois. En effet, à la suite d'un examen réalisé par la Commission chinoise des affaires du cyberespace, certains produits du fournisseurs ont été définis comme « risqués » pour la sécurité de la chaîne d'approvisionnement des infrastructures technologiques clés du pays. Les autorités chinoises n'ont cependant pas précisé quels produits étaient interdits, quels types de risques de sécurité ils représentaient, ni ce qu'il adviendrait des composants Micron déjà utilisés.
De plus, dans un communiqué, la Commission affirme que l'examen a également révélé que « les produits Micron présentent des problèmes de cybersécurité graves [...] ce qui affecte la sécurité nationale de la Chine ». Elle ajoute que, pour cette raison, le Bureau d'examen de la sécurité du réseau a estimé que la révision de la politique de sécurité du système ne devait pas être approuvée : « Conformément à la loi sur la sécurité des réseaux et à d'autres lois et règlements, les opérateurs de services sensibles (télécoms, internet, banques...) en Chine doivent cesser d'acheter des produits Micron ».
Cette décision de l'Empire du milieu pourrait être considérée comme la première mesure de rétorsion suite à l'interdiction instaurée dans plusieurs autres pays d'importer du matériel chinois pour des raisons de sécurité. Certains, comme le Royaume-Uni et la Suède, ont imposé des interdictions sur le hardware en provenance de Chine. De son côté, l'Allemagne continue d'examiner de près l'utilisation de produits chinois dans ses réseaux de services sensibles.
Les États-Unis et Micron réagissent
Après cette annonce, le ministère américain du Commerce a publié une déclaration dans laquelle il s'oppose à la restriction, estimant que celle-ci n'est pas fondée. « Nous avons pris connaissance de l'annonce de la République populaire de Chine (RPC) concernant Micron. Nous nous opposons fermement à ces restrictions qui ne reposent sur aucun fondement », déclare un porte-parole du ministère dans un communiqué partagé sur Twitter.
Le communiqué stipule également que cette action, ainsi que les raids récents et le ciblage d'autres entreprises américaines sont incompatibles avec les affirmations de la Chine selon lesquelles elle ouvre ses marchés et s'engage à mettre en place un cadre réglementaire transparent. « Nous nous entretiendrons directement avec les autorités de la RPC afin de clarifier notre position et leur action. Nous nous engagerons également avec nos principaux alliés et partenaires pour assurer une coordination étroite afin de remédier aux perturbations du marché des puces mémoires causées par les actions de la Chine ».
Parallèlement, un représentant de Micron a déclaré à notre confrère CSO : « Nous avons reçu l'avis de la CAC suite à son examen des produits Micron vendus en Chine. Nous sommes en train d'évaluer ses conclusions et de déterminer les prochaines étapes. Nous nous réjouissons de poursuivre les discussions avec les autorités chinoises ». Toujours est-il que cette annonce intensifie les désaccords commerciaux qui existent entre différents pays (Chine, Etats-Unis, Royaume-Uni,...) concernant les semi-conducteurs et renforce les perturbations sur la chaîne d'approvisionnement mondiale.
La Chine répond aux attaques américaines
Pour rappel, face à l'escalade des tensions géopolitiques entre les États-Unis et la Chine, les administrations de Donald Trump et de Joe Biden ont successivement instauré une série de mesures interdisant l'utilisation de matériel fabriqué en Chine, puis des contrôles sur les exportations de technologie des semi-conducteurs vers son principal rival. En effet, en octobre dernier, Joe Biden a instauré une régulation visant à empêcher les entreprises américaines de vendre des CPU et des équipements avancés à certains fabricants chinois, à moins qu'elles n'obtiennent une licence spéciale. L'objectif étant de freiner le développement de technologies de pointe qui pourraient, selon les Américains, être utilisées pour la modernisation militaire et comme outils de violations des droits de l'Homme. En décembre 2022, ces restrictions ont été étendues à 36 autres fabricants chinois de puces électroniques, dont Yangtze Memory Technologies Corporation (YMTC), le principal fabricant de composants en Chine.
Enfin, en mars 2023, le gouvernement néerlandais a annoncé qu'il allait à son tour instaurer des restrictions sur les exportations vers la Chine de technologies avancées nécessaires à la fabrication de puces. Une déclaration qui devrait notamment affecter la confection de composants avancés et des modules mémoires (DRAM).
Les pays renforcent leurs activités fonderies
Ainsi, alors que les restrictions se multiplient, de nombreux pays cherchent à renforcer leurs capacités de fabrication de puces. A l'image du gouvernement britannique qui, au début du mois de mai, a dévoilé sa stratégie décennale de soutien à l'industrie des semi-conducteurs. Celle-ci prévoit notamment des investissements d'un milliard de livres sterling (1,15 Md€) pour stimuler les efforts de recherche et de développement et renforcer les compétences dans l'industrie.
Les États-Unis et l'Inde ont également signé un protocole d'accord sur l'établissement d'une chaîne d'approvisionnement en puces afin de réduire la dépendance mondiale à l'égard de la Chine. En juillet, le Sénat américain a approuvé la loi CHIPS, qui prévoit 52 Md$ d'aide aux entreprises désireuses de fabriquer des produits aux États-Unis, ainsi qu'un crédit d'impôt de 25 % pour les investissements dans l'industrie, et des subventions pour la recherche et le développement de la main-d'oeuvre. De son côté, la Chine investit 143 Md$ pour stimuler son industrie nationale de semi-conducteurs.
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