Les GPU A100 de Nvidia font partie du lot de produits sous le coup de restrictions américaines. (Crédit : Nvidia)
Changement de calendrier brutal pour les entreprises technologiques américaines qui exportent en Chine. Du fait de l'intensification des tensions entre les deux pays, Nvidia et d'autres fabricants de puces sont soumis dès cette semaine à plusieurs restrictions d'exportations de GPU pour l'IA.
La Chine et les États-Unis ont haussé le ton ces dernières semaines, entraînant dans leur bataille de nombreuses entreprises technologiques. La dernière en date n'est autre que Nvidia qui vient d'annoncer que de nouvelles restrictions américaines sur la vente de ses puces d'intelligence artificielle haut de gamme à la Chine sont entrées en vigueur lundi, les régulateurs ayant avancé la date limite. Selon Reuters, les restrictions étaient censées entrer en vigueur le 16 novembre 2023, lorsque l'administration Biden a dévoilé des mesures visant à empêcher des pays, dont la Chine, l'Iran et la Russie, de recevoir des puces d'IA avancées conçues par Nvidia et d'autres. Dans un dossier 8K publié lundi, Nvidia a indiqué avoir reçu un avis du gouvernement américain selon lequel les règles régissant la vente de puces IA à la Chine étaient « en vigueur immédiatement, affectant les expéditions des produits A100, A800, H100, H800 et L40S de la société ». Pour mémoire, les puces A800 et H800 ont toutes deux été créées pour le marché chinois afin de se conformer aux règles d'exportation précédentes. Il y a une semaine environ, les États-Unis ont annoncé la RTX 4090 du fabricant faisaient partie de la liste des restrictions à l'exportation.
Pour l'heure, Nvidia ne s'attend pas à un impact à court terme sur ses bénéfices. Toutefois, la firme n'a pas précisé pourquoi le gouvernement américain avait accéléré le calendrier. Cette déclaration tombe à un moment crucial pour le fabricant de puces graphiques américain ; ce dernier a en effet reçu une commande importante de la part des géants chinois du Web, dont Alibaba, Baidu, ByteDance et Tencent. En août dernier, Financial Times dévoilait que ces entreprises avaient commandé pour 1 Md$ d'A800 et s'étaient engagés à acheter pour 4 Md$ supplémentaires de GPU à Nvidia en 2024. Il semble clair désormais que la plupart de ces commandes ne seront pas exécutées. En parallèle, la firme américaine a fait part de sa collaboration avec Hon Hai Technology Group (Foxconn) pour « accélérer la révolution industrielle de l'IA », un rapprochement qui pourrait être entaché par ces annonces.
Nvidia se rapproche de Foxconn : hasard du calendrier ?
La semaine dernière, Nvidia a ainsi annoncé que Foxconn intégrera sa technologie pour « développer une nouvelle classe de datacenters alimentant un large éventail d'applications, notamment la numérisation des flux de fabrication et d'inspection, le développement de plateformes de véhicules électriques et de robotiques alimentées par l'IA, ainsi qu'un nombre croissant de services d'IA générative basés sur le langage. Ce rapprochement doit se concrétiser dans un premier temps par la création d'usines - une infrastructure informatique GPU Nvidia spécialement conçue pour traiter, affiner et transformer de grandes quantités de données en modèles et tokens d'IA de valeur - basée sur la plateforme informatique accélérée du fabricant de puces, notamment le dernier Superchip GH200 Grace Hopper ainsi que le logiciel AI Enterprise. « Nvidia et Foxconn construisent ces usines ensemble. Nous aiderons l'ensemble du secteur à entrer beaucoup plus rapidement dans la nouvelle ère de l'IA », a déclaré Young Liu, CEO et Chairman de Foxconn.
En parallèle, Foxconn développe également ses plateformes de solutions avancées basées sur les technologies de la firme américaine. Cela comprend Smart EV qui sera construit sur Nvidia DRIVE Hyperion 9, une plateforme de dernière génération pour les flottes automobiles autonomes, alimentée par DRIVE Thor, ses futurs SoC pour l'industrie automobile, mais aussi des systèmes robotiques Foxconn Smart Manufacturing construits sur la plateforme robotique mobile autonome Isaac. Enfin, Foxconn Smart City intégrera la plateforme d'analyse vidéo avancée Metropolis. En travaillant avec Nvidia, la société chinoise espère construire un grand nombre de systèmes basés sur des processeurs, des GPU et des réseaux Nvidia pour sa clientèle mondiale, qui cherche à créer et exploiter ses propres usines IA, optimisées avec le logiciel AI Enterprise. Pour Jensen Huang, fondateur et CEO de la firme américaine, ce rapprochement est la suite logique au développement de l'entreprise dans la voie de l'IA générative : « Foxconn possède l'expertise et l'envergure nécessaires pour construire des usines d'IA à l'échelle mondiale. Nous sommes ravis d'étendre notre partenariat de dix ans avec Foxconn pour accélérer la révolution industrielle de l'IA ».
Des restrictions qui touchent les entreprises américaines une à une
Ces restrictions ne touchent évidemment pas uniquement Nvidia. Advanced Micro Devices, par exemple, est également touché par les restrictions. Récemment, la firme a annoncé la signature d'un accord définitif portant sur l'acquisition d'une start-up de logiciels orientée IA baptisée Nod.ai. Si devant les caméras le message est « d'accélérer le déploiement de solutions d'IA optimisées sur les plateformes d'AMD », en coulisses il s'agit surtout de rattraper son rival, le fabricant d'accélérateurs graphiques américain Nvidia. « L'ajout de Nod.ai apportera à AMD une équipe expérimentée qui a développé une technologie logicielle de pointe qui accélère le déploiement de solutions d'IA optimisées pour les accélérateurs AMD Instinct, les puces Ryzen AI, les puces Epyc, les SoC Versal et les GPU Radeon » précisait alors la firme.
Malgré cet élan, l'annonce faite par le Bureau américain de l'industrie et de la sécurité concernant des mesures supplémentaires a fait baisser les cours des actions des principaux fournisseurs américians (AMD, Intel et Nvidia) la semaine dernière. Les actions de Nvidia ont été les plus durement touchées, chutant de 3,54 % à la mi-journée pour atteindre 423,87 dollars sur le Nasdaq ce 18 octobre. Ce lundi, à l'ouverture du Nasdaq, l'action a même baissé à 412,43 dollars avant de remonter légèrement jusqu'à aujourd'hui, se stabilisant à 436,63 dollars. De son côté, Intel, qui a commencé à vendre ses puces Gaudi 2 en Chine en juillet, a déclaré qu'il « révisait la réglementation et évaluait son impact potentiel ».
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