La vente à bas prix de produits copiés conçus en Asie menace les parts de marché des fabricants de compatibles et des marques en Europe. Face à cette attaque foudroyante, les premiers ont déjà commencé à s'organiser en attendant que les secondes s'emparent réellement du problème.
Il y a péril en la demeure. Après les Etats-Unis d'où ils ont fini par être chassés, les fabricants de consommables clonés basés en Chine et en Asie du Sud-Est se sont lancés à l'assaut du marché européen. Vendus à bas prix, ces produits neufs ont tous pour point commun de violer les brevets déposés par les fabricants de produits d'origine telle que HP, Xerox, Ricoh... A cette infraction peut s'ajouter le fait que leurs packagings arborent indument la marque d'un grand fournisseur ou la mention « compatible ». Très tôt victimes de l'arrivée de ces produits en Europe, les fabricants de consommables remanufacturés (ou compatibles) ont été les premiers à tirer la sonnette d'alarme. « Cela fait un an un à un en et demi que nous constatons une progression continue de la vente de ces produits », s'alarme Vicent Van Dijk, le secrétaire général de l'ETIRA (association européenne des fabricants de toners et de cartouches d'encre remanufacturés). Et à en croire Régis Thébaud, le directeur des opérations du groupe Armor, un membre de l'Etira, les dégâts sont déjà importants : « En moins deux ans, les cartouches clonées ont fait disparaître les fournisseurs locaux de consommables remanufacturés en Espagne. En Italie, on estime qu'elles ont pris 50% du marché des consommables, hors marques d'origine.» Selon l'ETIRA, l'Europe du Sud et de l'Est sont les principales zones touchées. Mais, d'autres pays comme la France sont déjà ciblés et pourraient voir la situation se dégrader d'avantage si rien n'est fait.
Les remanufactureurs organisent la lutte seuls en attendant les marques
A l'origine, les fabricants de cartouches clonées asiatiques concevaient des consommables remanufacturés exportés en Europe et aux Etats-Unis. Mais pour pouvoir produire ce type de produit, encore faut-il disposer de cartouches d'origine usagées. Faire des consommables neufs s'avérant finalement plus simple, ils se sont mis à produire des cartouches de ce type en attaquant initialement le territoire américain. Outre-Atlantique, les grandes marques ont fini par réagir en intentant des actions en justice et obtenir l'arrêt de la vente de cartouches clonées venues d'Asie. « Les fabricants de produits d'origine ont beaucoup plus de difficultés à mener ce type d'actions en Europe, explique Vicent Van Dijk. Aux Etats-Unis, une seule procédure est valable pour l'ensemble du territoire. En Europe, il faut lancer autant d'actions en justice qu'il y a de pays et donc de brevets déposés ». Mais là n'est pas le seul problème. Selon l'ETIRA, le manque de volonté dont ont fait preuve jusqu'ici les fabricants de cartouches d'origine a laissé le champ relativement libre aux fabricants de cartouches clonées. « Les grandes marques pensaient que les clones chinois allaient surtout prendre des parts de marché aux fabricants de produits remanufacturés. Mais c'est une erreur car dans des pays comme l'Espagne, les produits clonés commencent à prendre des parts de marché aux cartouches et toners d'origine », constate Régis Thébaud. « Cela fait quelques mois que les grandes marques se réveillent, pondère Vicent Van Dijk. Mais il va falloir attendre encore un certains temps avant qu'elles n'intentent massivement des actions car elles veulent être sûres que leurs attaques reposeront sur des bases juridiques solides.»
Des importateurs et des distributeurs sous surveillance
En attendant que les marques bougent et à défaut de pouvoir
Régis Thébaud
Armor Group
intenter des actions à leur place, les fabricants de produits remanufacturés sont déjà passés à l'attaque. Pour agir, ils se basent sur le fait que les produits clonés portent souvent la mention compatible. Les fabricants de clones étant basés hors des frontières européennes, ce sont donc leurs relais commerciaux en Europe que l'ETIRA et ses membres surveillent. « Depuis 18 mois, nous avons attaqués des importateurs et des distributeurs en pointant le fait que la mention compatible qui apparaît sur des produits clonés qu'ils revendent constituait une tromperie pour les consommateurs », relate Vicent Van Dijk. Et lorsque les marques se réveilleront, ce seront les mêmes importateurs et distributeurs qui se retrouveront de nouveau dans le collimateur. « Si nous ne bougeons pas, les distributeurs pourraient penser qu'ils ne courent aucun danger, au risque que les plus importants d'entre se mettent à commercialiser du consommables clonés et nous mettent encore plus en danger », conclut vincent Van Dijk.
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