" CMM-I est avant tout une démarche pragmatique permettant à l'entreprise d'améliorer ses prestations en permanence et d'augmenter sa productivité "
Distributique : De plus en plus de SSII s'orientent vers une démarche CMM-I ; en quoi est-ce nécessaire ?
Yahya El Mir : Le modèle CMM-I (voir encadré plus bas) répond pleinement aux nouvelles exigences des entreprises, à savoir le respect du périmètre fonctionnel de leurs projets informatique, des délais et des budgets. Pour l'avoir initié dès 2002, nous savons que seul ce modèle est en mesure de correspondre à cette équation. Loin des querelles d'experts, CMM-I est avant tout une démarche pragmatique permettant à l'entreprise d'améliorer ses prestations en permanence et d'augmenter sa productivité. C'est aussi la condition sine qua non de qualité des projets Offshore. CMM-I répond aux problématiques des SSII à deux niveaux. Il leur permet d'une part de répondre au niveau d'exigence croissant des clients et au bon rapport qualité prix qu'ils demandent. CMM-I devient un élément de différenciation, qui n'est pas marketing mais porte sur la qualité de la prestation. Cela est particulièrement vrai dans certains environnements comme l'aéronautique. D'autre part CMM-I est un moyen d'améliorer les marges des SSII tout en répondant aux besoins de tarifs bas des clients alors que celles-ci sont soumises à des pressions tarifaires depuis plusieurs années. Les directions achats qui interviennent dans la décision recherchent un rapport qualité/prix, CMM-I est un élément de cette qualité et être certifié permet plus de souplesse pour négocier les prix en garantissant la qualité. Les directions achat incitent les fournisseurs à être certifiés CMM-I, même si ce n'est pas explicite dans les appels d'offres. Les entreprises qui ont expérimenté cette approche répercutent cette pression sur les fournisseurs, qui s'intéressent donc au modèle. Les SSII qui prennent ce virage misent sur une forte valeur ajoutée par rapport aux clients, mais CMM-I ne concernera pas tout le monde. Ayant une image de spécialiste à forte valeur ajouté, ce modèle était très bien pour nous.
Distributique : Quand et pourquoi avez vous engagé un processus CMM-I ?
Yahya El Mir : Nous avons engagé cette démarche en 2002 pour trois raisons : améliorer la qualité apportée à nos clients, fédérer nos équipes autour d'un grand projet d'entreprise, maîtriser nos projets au forfait. Nous réalisons 50% de notre activité au forfait, il était nécessaire d'en améliorer la rentabilité.
Distributique : Quels sont les obstacles ?
Yahya El Mir : Nous nous sommes heurtés à beaucoup de scepticisme, en interne comme en externe : les projets qualité initiés dans les années 90 n'avaient pas eu les résultats escomptés. Nous étions convaincu de la réussite car CMM-I a été conçu spécifiquement pour l'informatique. Il s'agit d'un projet de management long, dont les résultats ne sont pas visibles immédiatement. La principale difficulté est de mobiliser suffisamment d'énergies pour le lancer et être capable de le faire très sérieusement. C'est un processus qui mobilise l'ensemble de l'entreprise. Il est nécessaire d'être convaincu de son aspect stratégique. Si une société ou une SSII n'en est pas convaincue ou le fait sous la pression, c'est voué à l'échec.
Distributique : Quel est, pour vous, le coût de la mise en place d'une démarche CMM-I ?
Yahya El Mir : Trois éléments de coûts sont à prendre en compte : le recours à un cabinet d'évaluation pour avoir un regard extérieur sur le processus et réaliser les audits ; les équipées dédiées à ce projet ; le temps mis par nos équipes pour mettre en place les pratiques et se former, durant lequel elles ne sont pas en mission. Pour 2005, nous évaluons l'ensemble de ces éléments à 2 millions d'euros, ce qui n'est pas une dépense nette de 2 M€. En fonction de la structure, cela représente de 2 à 6% du chiffre d'affaires. Le retour sur investissement est conséquent, le SEI (Software Engineering Institute) l'estime à 3 ou 4 fois l'investissement initial - mais il faut accepter qu'il soit différé : les premiers résultats se constatent après 12 à 18 mois.
Distributique : comment mesurez vous le retour sur investissement ?
Yahya El Mir : Les résultats sont d'abord mesurés en termes de satisfaction client. Sur toutes les prestations, un bilan, noté, est fait avec chaque client. L'amélioration de la satisfaction est donc mesurée précisément, et corrélé avec l'augmentation du chiffre d'affaires chez nos clients. Nous mesurons également l'amélioration de la maîtrise des projets au forfait : des indicateurs précis permettre de suivre la productivité et la maîtrise des budgets : nous n'avons pas un seul projet au forfait en crise. Au niveau des clients le retour est très positif : nos équipes deviennent meilleures, elles sont mieux formées et mieux outillées. Mais CMM-I est un processus continu. Nous définissons un plan d'amélioration tous les 18 mois puis développons les pratiques correspondantes. Les indicateurs de pilotage ont évolué avec CMM-I. Par exemple, tous nos chefs de projets et directeur d'agences ont été sensibilisé et disposent des indicateurs de rentabilité des projets au forfait, d'indicateurs de respects des charges et de satisfaction client.
C'est également un bon moyen de recrutement : 9 nouveaux collaborateurs sur 10 nous ont connu grâce à CMM-I : ils veulent travailler dans le meilleur environnement possible. C'est aussi un moyen d'intégration rapide des sociétés acquises.
Distributique : Ou en êtes vous aujourd'hui ?
Yahya El Mir : Certaines de nos agences régionales en sont au niveau deux, d'autres au niveau trois. Il existe des écarts entre elles car nous ne disposons que d'un site pour former nos équipes. L'objectif est que l'ensemble de nos agences régionales atteignent le niveau 3 en 2006, et certaine le niveau 4. Mais ce qui prime, c'est le travail de fond. Nous ne sommes pas dans un schéma de course à la certification. La priorité n'est pas l'acquisition des niveaux le plus rapidement possible mais de les valoriser sur le terrain et d'améliorer la rentabilité des projets au forfait.
Définition Q Labs (spécialiste européen du CMM-I) :
Le CMM-I - Capability Maturity Model Integrated - est un référentiel qui permet aux entreprises de mesurer leurs pratiques de développement par rapport aux meilleures techniques du moment et de définir un plan d'actions pour tendre vers l'excellence, minimiser les risques et assurer ainsi que leurs produits/services à base de composants logiciels soient les plus compétitifs du marché. CMM-I existe depuis 1987, à l'initiative du ministère de la défense américain qui souhaitait imposer des normes à ses fournisseurs.
Yahya El Mir, Président du Directoire de SQLI
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