Pris dans la tempête des tensions internes, des développements précipités et d'une concurrence toujours plus exacerbée, le CEO d'Apple, Tim Cook, doit coûte que coûte maintenir le cap. (crédit : D.R.)
Le rapport trimestriel d'Apple affiche des revenus en or. Mais selon notre confrère de Computerworld, ces milliards de bénéfices masquent plusieurs problèmes fondamentaux auxquels l'entreprise est confrontée.
Comment oser dire qu'Apple est en difficulté quand l'entreprise vend 10 iPhone par seconde et que ses revenus trimestriels atteignent un record historique de 88,3 milliards de dollars, en augmentation de 13 % par rapport à l'année précédente. Avec un énorme bénéfice trimestriel de 20,1 milliards de dollars. Alors, pourquoi ne pas reconnaître un tel succès ? La réponse est relativement simple. Ces milliards ne doivent pas masquer des problèmes fondamentaux qui pourraient avoir un impact sur le niveau de ces recettes. Tout d'abord, les ventes d'iPhone X, le dernier smartphone haut de gamme d'Apple, sont à la traîne. Ming-Chi Kuo, analyste de KGI Securities, qui a la réputation d'être « l'analyste le plus avisé du monde sur Apple », pense qu'Apple va « tuer » son mobile à 1159 euros TTC (à partir de) au motif que les ventes sont en deçà des prévisions. Déjà, à court terme, Apple semble marquer un recul par rapport à l'iPhone X. La division Samsung Display, qui encaisse une centaine d'euros pour chaque écran d'iPhone X vendu, a ralenti sa production de diodes OLED pour s'adapter au niveau de ventes de l'iPhone X.
Selon d'autres rapports, « au cours de ce trimestre, Apple va réduire de moitié son objectif de production d'iPhone X, initialement fixé à 40 millions d'unités au moment de sa sortie en novembre ». L'analyste Ming-Chi Kuo pense même qu'Apple pourrait arrêter de vendre des iPhone X et mettre carrément fin à la gamme. La plupart des analystes avancent deux raisons à cela. Ming-Chi Kuo constate que le marché chinois n'aime pas l'iPhone X à cause de l'encoche du capteur qui réduit l'espace visible sur l'écran. Ensuite, même si beaucoup de gens étaient prêts à payer un prix élevé pour s'offrir un iPhone, leur nombre a été moins élevé que ce qu'Apple espérait. À cela, notre confrère de Computerworld ajoute deux autres explications. En premier lieu, celui-ci pense que les personnes qui pouvaient se permettre de dépenser plus de 1000 euros pour l'achat d'un smartphone se sont rendu compte, après les révélations sur le ralentissement des mobiles par Apple, que, d'une certaine façon, ils se faisaient arnaquer. Selon lui, ils n'ont pas apprécié qu'Apple ralentisse délibérément les iPhone plus anciens à l'insu des utilisateurs. Ils ont eu le sentiment que le vendeur les avait trompés alors qu'ils étaient des clients fidèles. Et l'offre d'une batterie de remplacement bon marché ne fait rien oublier.
Des problèmes de développement récurrents sur iOS
Ensuite, même les fans les plus fidèles d'Apple savent qu'iOS n'est pas au point et qu'iOS 11.x est miné par des bugs récurrents. Le dernier bug en date ? Si vous voulez vraiment - mais vraiment - faire une mauvaise blague à un utilisateur d'iPhone, envoyez-lui simplement un message instantané ou un courriel avec quelques symboles de la langue indienne du sud Telugu : plantage sérieux de l'iPhone garanti. Sérieux comment ? En général, l'utilisateur n'aura d'autre choix que de réinitialiser le téléphone, c'est à dire d'aller dans Paramètres>Général>Réinitialiser, puis « Effacer tout le contenu et les paramètres ». Mieux vaut avoir une sauvegarde récente à portée de main, elle sera utile ! Apple a reconnu en interne qu'iOS et ses plans de développement n'avaient pas été bien gérés. Le constructeur a prévu de commencer par nettoyer son code, ce qu'on appelle « l'assurance qualité », avant d'introduire de nouvelles fonctionnalités. Bon gré mal gré. Mais notre confrère a du mal à y croire.
Comme l'a déclaré anonymement un ancien développeur d'iOS sur Reddit, les chefs de projet, et non les programmeurs, sont devenus les maîtres du jeu et « tout est devenu prioritaire ». « P0 signifiait : réparation d'urgence immédiate, P4 voulait dire : utile. Le résultat ? Tout a été fait dans l'urgence... C'est comme ça que l'on s'est retrouvé à livrer des versions pleines de bugs. Les chefs de projet ont pris en main la planification et les ingénieurs décidaient sur un coup de tête que quelque chose était de niveau P2. En gros, tout a toujours été remis à plus tard. Au bout du compte, les ingénieurs ne pouvaient plus décider du moment de libération d'une fonction ». Mais le développeur pense que ces « fuites » sur la qualité sont orchestrées par les RP d'Apple pour justifier les bugs d'iOS 11. Sauf si l'entreprise veut réduire le pouvoir des tout-puissants chefs de projet, il pense que « cela ne changera pas l'ingénierie ».
Un fer au pied qui s'appelle iPhone
Pire encore, il affirme qu'Apple fonctionne toujours selon un modèle de développement en cascade, ce qui rendrait l'entreprise incapable de s'adapter aux circonstances. Notamment si le logiciel est affecté par plusieurs méchants bugs. Le système en cascade ne permet pas non plus de trouver ces bugs, car les tests sont repoussés. Et à un moment donné, il est trop tard pour apporter des changements. Dans le cas d'Apple, il est clair que l'entreprise ne fait pas suffisamment de tests sur iOS. Pour régler ce problème, il faudrait plus que de bonnes intentions. Notre confrère ne croit pas non plus qu'Apple est prêt à prendre les mesures radicales qui s'imposent pour transformer ses modes de gestion et de développement afin d'améliorer la qualité de ses logiciels. Au moins, selon lui, l'entreprise est enfin confrontée à ses problèmes internes. Elle sait également que pendant ce temps, ses ennemis et rivaux ne sont pas inactifs. Mis à part ceux que l'on connaît déjà, dont le leader mondial des smartphones, Samsung, il y a aussi des fabricants chinois de smartphones comme Xiaomi, Huawei et Oppo, qui affichent des ventes à deux chiffres de croissance.
La survie d'Apple est intimement liée à l'iPhone : au premier trimestre 2018, 69,74 % de son chiffre d'affaires provenait des ventes d'iPhone. Si celles-ci diminuent, Apple peut se trouver en difficulté. Les ventes de smartphones baissent déjà en Chine, et elles ralentissent partout ailleurs, ce qui signifie que le problème ne concerne pas seulement Apple. Selon notre confrère, en terme de ventes de smartphone, on a atteint un plafond. Aujourd'hui, seuls certains utilisateurs estiment encore qu'ils doivent renouveler leur mobile tous les deux ans au moins. Mais ce n'est plus la majorité. Les fabricants de mobiles peuvent booster leurs derniers modèles avec des innovations en tout genre, mais en réalité, ces améliorations ne justifient plus l'achat d'un nouveau mobile. Qu'apporte de plus le dernier des mobiles, vendu plusieurs centaines d'euros, par rapport à un modèle sorti il y a 18 mois ? En ce qui concerne l'avenir, pour cette année, Apple prévoirait de livrer trois nouveaux modèles d'iPhone. Le constructeur pense que les utilisateurs voudront toujours le dernier modèle. Notre confrère estime que l'entreprise aurait plus à gagner en se concentrant d'abord sur la qualité de ses logiciels avant que les clients ne réalisent que la marque de luxe ne vaut pas mieux qu'une marque de seconde catégorie.
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