Nokia a fait perdre 7,6 Mds$ à Microsoft

Beaucoup l'avaient dit mais le rachat de Nokia Mobiles était une très mauvaise idée. Satya Nadella a donc décidé de faire le ménage.

Beaucoup l'avaient dit mais le rachat de Nokia Mobiles était une très mauvaise idée. Satya Nadella a donc décidé de faire le ménage.

Avec 7800 personnes de plus sur le carreau, la stratégie de reconquête mobile initiée par Steve Ballmer est désormais rangée dans la catégorie pertes et profits. Satya Nadella compte passer près de 7,6 milliards de dollars en dépréciation d'actifs.

Microsoft a inscrit hier dans ses comptes une charge de dépréciation d'actifs de 7,6 milliards de dollars relative à l'acquisition de Nokia. Cette perte de valeur correspond à peu de chose près au prix payé l'an dernier par la firme de Redmond pour le rachat de l'activité mobile et des brevets du constructeur finlandais. Microsoft a également annoncé 7 800 licenciements touchant essentiellement des personnels de la division mobile de Nokia intégrés à Microsoft.

Cette annonce confirme le ratage complet d'une des dernières importantes décisions prises par l'ancien CEO Steve Ballmer. En effet, les derniers mois où il était aux commandes, c'est lui qui a poussé au rachat de Nokia, contre l'avis d'un certain nombre de dirigeants de l'entreprise, dont Satya Nadella, avant que ce dernier ne soit nommé au poste de directeur exécutif. « Ce fut une erreur de s'engager dans cette transaction », a déclaré Jack Gold, analyste principal chez J. Gold Associates. « Une erreur monumentale. Car Microsoft n'avait rien à faire dans l'activité mobile qui dégageait de faibles marges et faisait prendre beaucoup de risques. Personne d'autre qu'Apple ne gagnait de l'argent dans ce secteur ».

Un prix d'achat beaucoup trop élevé pour Nokia Mobiles 

Microsoft a annoncé l'acquisition des actifs mobiles de Nokia en septembre 2013, soit quelques semaines seulement après l'annonce de sa démission par Steve Ballmer, a et finalisé ce rachat en avril 2014. Selon un document déposé en avril 2015 auprès de la Securities and Exchange Commission américaine (SEC), le prix d'achat final s'élevait à 7,9 milliards de dollars environ. « Au quatrième trimestre de l'exercice 2015, Microsoft va enregistrer une charge de dépréciation d'actifs et d'écart d'acquisition ou « Goodwill » dans son activité hardware mobile, liée à l'activité NDS », a déclaré hier Microsoft dans un communiqué, en référence à la division Nokia Devices and Services (NDS) acquise par l'entreprise de Redmond. Le terme « dépréciation d'actifs » est utilisé quand la valeur de marché d'une entreprise est inférieure à la valeur consignée dans les livres comptables. Dans ce genre de situations, les entreprises sont tenues d'équilibrer leurs comptes en prenant une charge non cash pour équilibrer la différence. Aucune somme d'argent n'est transférée, mais la dépréciation aura un impact sur les résultats trimestriels de juin et sur les résultats de son exercice fiscal annuel de Microsoft. « L'argent a déjà été dépensé », fait remarquer Jack Gold.

Microsoft avait déjà inscrit 5,5 milliards de dollars de dépréciation pour amortir l'écart d'acquisition de Nokia, et 4,5 milliards de dollars en actifs incorporels, dont la majeure partie correspondait aux brevets rachetés à la firme finlandaise. Étant donné que le « Goodwill » est la différence entre le prix d'achat et les actifs réels, incorporels ou non, le fait que Microsoft inscrive la totalité du montant montre également que le prix d'achat de Nokia avait été surestimé. Cette dépréciation est la plus élevée jamais appliquée par Microsoft. Elle dépasse de 23 % la charge de 6,2 milliards de dollars inscrite dans son bilan en 2012 qui entérinait l'échec du rachat de la société de marketing et de publicité en ligne aQuantive en 2007. « Il faut accorder beaucoup de crédit à Satya Nadella pour prendre de telles mesures », a estimé Jack Gold, jugeant la décision prise par le CEO d'entériner l'erreur et d'aller de l'avant. Dans un rapport livré peu de temps après l'annonce de Microsoft, Jan Dawson, analyste en chef de Jackdaw Research, semble d'accord avec ce point de vue. « L'élément essentiel est que Microsoft va se décharger complètement de la valeur de cette acquisition, si bien que si elle doit mettre fin à cette activité mobile, elle n'aura probablement pas besoin de faire une nouvelle dépréciation de valeur », a écrit l'analyste.

4 salariés sur 5 de Nokia finalement remerciés

En même temps que la dépréciation, Microsoft a annoncé qu'il allait licencier environ 7800 personnes. La plupart des personnels affectés travaillent pour la division Device, en particulier l'entité en charge de l'activité Mobile. « Ces licenciements, plus d'autres mesures de restructuration, devraient coûter entre 750 et 850 millions de dollars », a déclaré Microsoft. Ils s'ajoutent aux 18 000 licenciements effectués par Microsoft l'an dernier, la plus importante réduction de personnel décidée par la firme de Redmond. « Quand cette phase de licenciements sera achevée, sur les 30 000 salariés de Nokia intégrés à Microsoft après le rachat, il n'en restera plus qu'un sur cinq », a calculé Jan Dawson. Satya Nadella a essayé d'expliquer cette décision dans un courriel envoyé à tous les employés. « Notre stratégie change : il ne s'agit plus de tirer de la croissance d'une activité de téléphonie autonome, mais de créer un écosystème dynamique pour Windows et pour notre première famille de terminaux », a déclaré le CEO. « Nous lancerons rapidement un portefeuille de mobiles plus efficace et mieux ciblé, sans nous priver de la capacité de réinventer la mobilité à long terme ».

Selon Jack Gold, cela signifie que l'entreprise va réduire considérablement son activité smartphone et proposer moins de modèles. Cette stratégie ressemble à la stratégie de niche adoptée par Microsoft pour sa ligne d'appareils Surface mi-tablettes mi-ordinateurs portables, en particulier la Surface Pro 3. « Si Microsoft veut faire quelque chose d'unique en terme d'activité, c'est très bien, et c'est vers cela que l'entreprise semble se diriger », a déclaré Jack Gold. Jan Dawson a convenu que Microsoft allait probablement revoir le nombre de ses modèles Lumia à la baisse, mais il interprète l'annonce de Satya Nadella différemment. « Je pense qu'ils vont réduire le nombre de modèles, mais cela ne signifie pas que Microsoft renonce à sa stratégie de toucher un grand nombre de consommateurs. Ils vont continuer à proposer un modèle un haut de gamme, et des modèles low-cost », a-t-il expliqué. Selon lui, Microsoft n'a pas non plus de raison de se concentrer sur les clients professionnels, si c'est ce qu'elle a fait, même si, il y a plusieurs années, de nombreux analystes pensaient qu'elle destinerait ses smartphones à ses meilleurs clients, c'est-à-dire aux entreprises. « Le fait est que les utilisateurs d'entreprise sont comme les autres », a déclaré l'analyste en chef de Jackdaw Research. « Ils veulent des téléphones pratiques à utiliser, qui leur permettent non seulement de travailler, mais aussi de faire des choses personnelles ».

La plus grosse dépréciation chez MS

Microsoft a déclaré que les licenciements et la restructuration, y compris les frais encourus, seraient en grande partie achevés d'ici la fin de l'année, et intégrés entièrement à l'exercice fiscal annuel, ou au plus tard à celui du 30 juin 2016. La firme de Redmond publiera davantage d'informations sur la dépréciation et sur les charges de restructuration dans le rapport de fin d'exercice fiscal qu'elle déposera à la SEC plus tard ce mois-ci. Satya Nadella et la CFO Amy Hood devront sans aucun doute affronter les questions de Wall Street sur ces stratégies lors de la prochaine présentation des résultats, prévue le 21 juillet.

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