La Commission européenne met en route son plan gigabit 2030

Lors de son discours sur la connectivité, Thierry Breton, commissaire européen au marché intérieur, a rappelé sa volonté de faire payer la bande passante aux géants technologiques. (Crédit : Commission européenne)

Lors de son discours sur la connectivité, Thierry Breton, commissaire européen au marché intérieur, a rappelé sa volonté de faire payer la bande passante aux géants technologiques. (Crédit : Commission européenne)

D'ici à 2030, tous les ressortissants européens, particuliers comme entreprises, bénéficieront d'une connectivité gigabit. C'est en tout cas ce que vise la Commission européenne à travers un ensemble d'initiatives. N'en déplaise aux GAFAM, ceux-ci devront également mettre la main au portefeuille.

Jeter les bases de la transformation du secteur de la connectivité de l'Union Européenne. Voilà la nouvelle mission que s'est donnée Bruxelles. Cette semaine, la Commission européenne a ainsi dévoilé une série de mesures destinées à permettre à tous les citoyens et entreprises au sein de l'UE de bénéficier d'une connectivité gigabit d'ici à 2030, conformément aux objectifs de la décennie numérique de l'Europe. « Les réseaux gigabit sont un tremplin pour notre transformation numérique. Ils sont à même de fournir des services innovants et de permettre le développement d'une activité économique plus efficace et de sociétés intelligentes, durables et numériques. La connectivité est essentielle pour que tous les Européens puissent bénéficier de ces opportunités, dans l'optique d'une transformation numérique centrée sur l'humain », indique Margrethe Vestager, vice-présidente exécutive pour une Europe adaptée à l'ère du numérique.

Encadre le déploiement d'infrastructures gigabit

La première mesure consiste en l'adoption d'une proposition de règlement sur les infrastructures gigabit, qui établira des règles en vue d'un déploiement plus rapide, moins coûteux et plus efficace des réseaux gigabit dans l'ensemble de l'UE. La Commission fait en effet le constat de l'urgence qu'il y a à disposer d'une plus grande quantité de bande passante à des vitesses plus rapides. Le développement de technologies comme le cloud, l'IA, le big data, la réalité virtuelle ou encore le métavers, et leur utilisation croissante au sein de secteurs variés est un défi pour la garantie d'une connectivité efficace. Le règlement sur les infrastructures gigabit devrait donc répondre à cette demande en hausse continue. Il remplacera la directive de 2014 sur la réduction du coût du haut débit. L'assurance d'avoir une meilleure connectivité passe notamment par le cadre du déploiement des infrastructures physiques sous-jacentes, telles que les gaines et les pylônes. Ces travaux représentent jusqu'à 70 % des coûts de déploiement du réseau.

Par ailleurs, tous les bâtiments neufs ou faisant l'objet d'une rénovation de grande ampleur devront être équipés de fibre optique afin que les citoyens puissent bénéficier des services de connectivité les plus rapides. Le règlement vient donc encadrer ce déploiement et s'assurer de la bonne tenue du chantier. Sur la question des coûts et de savoir à qui il incombe de régler la facture, le débat est toujours ouvert. Thierry Breton, commissaire au marché intérieur l'a rappelé lors son discours sur la connectivité : « Aujourd'hui, l'accès à une connectivité rapide et sécurisée devient une réalité pour tous, partout dans l'UE. Mais l'internet ultrarapide exige des investissements considérables. Nous facilitons donc le déploiement des réseaux à court terme, mais nous nous penchons aussi sur un aspect important, à savoir déterminer qui devrait prendre en charge les coûts de la nouvelle génération d'infrastructures de connectivité, et notamment si les coûts d'investissement nécessaires à cet égard devraient être partagés entre les plateformes et les opérateurs de télécommunications ». Les géants technologiques sont en effet dans le viseur de l'UE et Bruxelles est bien décidée à leur faire payer la bande passante. Sont notamment ciblés Amazon, Apple, Facebook, Google, Microsoft ou encore Netflix. En rappelant cette intention de partager les coûts, Bruxelles s'attire les bonnes grâces des opérateurs télécoms. En novembre dernier, dans une lettre ouverte adressée aux régulateurs européens, une douzaine de dirigeants d'opérateurs télécoms européens, dont ceux de BT Group, Deutsche Telekom, Orange et Telefónica ont exprimé leur mécontentement. Les opérateurs ont ainsi appelé à une « forte adhésion politique pour garantir que l'action réglementaire favorise l'investissement dans les réseaux Gigabit, ce qui nécessitera un investissement supplémentaire de 300 milliards d'euros ».

Le Parlement européen et le Conseil doivent encore examiner la proposition de règlement. Toutefois, dès son adoption, le règlement sera directement applicable dans tous les États membres.

Guider les autorités de régulation nationales

La deuxième mesure consiste en un projet de recommandation sur le gigabit. Les autorités de régulation nationales (ARN) seront ainsi orientées sur les conditions d'accès aux réseaux de télécommunications des opérateurs sur le marché. L'objectif étant de garantir à tous les opérateurs l'accès à cette infrastructure de réseau existante. Le tout dans un seul et unique objectif : inciter à abandonner plus rapidement les technologies traditionnelles dans des délais impartis (sous 2 à 3 ans) et à accélérer le déploiement des réseaux gigabit. Pour ce faire, une certaine souplesse tarifaire sera promue pour l'accès aux réseaux réglementés.

Le projet de recommandation a été transmis à l'Organe des régulateurs européens (ORECE) pour une consultation d'une durée de 2 mois. Une fois son avis rendu, la Commission adoptera sa recommandation finale. Cette recommandation sur le gigabit remplacera les recommandations sur l'accès, à savoir la recommandation sur l'accès aux réseaux de nouvelle génération (2010) et la recommandation sur des obligations de non-discrimination et des méthodes de calcul des coûts cohérentes (2013).

Une consultation publique lancée en parallèle

Enfin, la Commission européenne a lancé une consultation exploratoire sur l'avenir du secteur de la connectivité et de ses infrastructures afin de recueillir des avis sur la manière dont l'augmentation de la demande de connectivité et les progrès technologiques pourraient influer sur l'évolution et les besoins futurs du secteur. Les parties prenantes sont également invitées à donner leur point de vue sur la manière de faire en sorte que les investissements nécessaires au déploiement de ces infrastructures soient mobilisés à temps dans l'Union. Lors de cette consultation, la question du prix - abordable - de la connectivité sera évidemment abordé, assure Bruxelles. Particuliers, organisations et entreprises sont invités à répondre à la consultation dans un délai de 12 semaines, soit jusqu'au 19 mai prochain. « La Commission est fermement résolue à oeuvrer pour la protection d'un internet neutre et ouvert » indique-t-elle dans un communiqué.

In fine, l'UE ambitionne à travers son programme de la décennie numérique à ce que, d'ici à 2030, tous les ménages européens soient couverts par un réseau gigabit et que toutes les zones habitées soient couvertes par des réseaux dont le niveau de performance est au moins égal à celui de la 5G.

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