Pour relancer Intel, Pat Gelsinger a choisi la voie de la technologie avec des innovations importantes dans la fabrication des composants. (Crédit S.L.)
Plusieurs éléments importants ont été mis en avant par le CEO d'Intel Pat Gelsinger lors de sa présentation Accelerated avec une feuille de route ambitieuse jusqu'en 2025 pour reprendre la main face à TSMC et AMD.
De retour chez Intel depuis février dernier, Pat Gelsinger n'a pas perdu de temps pour imposer sa marque et redéfinir la stratégie du fondeur. Hier soir lors d'un événement baptisé Intel Accelerated, le CEO a déroulé les actions entérinées pour les cinq années à venir afin de redevenir le leader sur le marché des semi-conducteurs en travaillant avec d'autres fondeurs et en fabriquant des puces spécifiques pour des clients comme AWS et Qualcomm. L'entreprise de Santa Clara compte également complètement changer la façon dont ses prochaines générations de microprocesseurs seront définies, discutées et évaluées, ouvrant la voie à l'ère de l'angström (0,1 nanomètre) à partir de 2024 avec le procédé 20A puis 18A.
Si les angströms sont la prochaine unité de mesure dans les semi-conducteurs - des microns aux nanomètres puis aux angströms - Intel ne mesurera rien en angströms aujourd'hui. Il utilise simplement le terme angström pour mettre en évidence ses prochaines générations de fabrication (20A et 18A). La firme a commencé à signaler ce changement en mars dernier (voir encadré), mais c'est aujourd'hui officiel et nommé. « Nous avons mené la transition vers le silicium à 90 nm, vers les grilles high-K métallique à 45 nm et vers le FinFET à 22 nm. Intel 20A sera un autre moment décisif dans les technologies de fabrication avec deux innovations révolutionnaires : RibbonFET et PowerVia », a déclaré Ann Kelleher, vice-présidente et directrice générale du développement technologique chez Intel.
La feuille de route d'Intel s'engage sur une nouvelle voie pour mieux mettre en avant les innovations du fondeur. (crédit Intel)
L'appellation SuperFIN 10 remplacée
Plus précisément, Intel réécrit la terminologie associée à ses procédés de fabrication. À l'avenir, sa technologie SuperFIN 10 améliorée (10ESF) s'appellera Intel 7, avec une augmentation d'environ 10 à 15 % des performances par watt par rapport à la première génération (10SF) selon le fournisseur, la plaçant au niveau du 7 nm de TSMC qu'AMD utilise pour ses puces Ryzen. L'Intel 7 sera inauguré sur les puces Alder Lake pour PC attendues en 2021, les Sapphire Rapids pour serveurs commercialisées au premier trimestre 2022 et les GPU Xe-HP et Xe-HPC IO Tire la même année.
Intel 4, l'ancien nom pour la fabrication 7 nm d'Intel, marquera le passage à la lithographie EUV (ultraviolet extrême) du néerlandais ASML pour imprimer avec une lumière à longueur d'onde ultra-courte. Cette technique de fabrication est devenue nécessaire, puisque la lithographie plus conventionnelle s'essouffle. Les détails des semi-conducteurs sont devenus trop petits par rapport aux longueurs d'onde de la lumière laser qui les découpent. Les fabricants de puces ont trouvé des moyens de « tricher » en utilisant des techniques appelées motifs, mais le procédé est tout simplement devenu trop complexe pour continuer. L'EUV, cependant, a ses propres limites. D'une part, le procédé nécessite probablement plus de puissance que la lithographie traditionnelle. Mais il exige également un vide, car le rayonnement EUV est absorbé par les matières solides de tous types. Les effets stochastiques aléatoires, qui peuvent provoquer des erreurs de fabrication, ont également constitué un défi avec la fabrication EUV. Intel travaille en étroite collaboration avec ASML pour assurer le succès de cette avancée industrielle au-delà de la génération actuelle d'EUV. Avec Intel 4, le fondeur annonce une augmentation d'environ 20 % de la performance par watt. La phase de production est programmée pour le second semestre 2022 avec des produits livrés en 2023 : processeurs Meteor Lake pour PC et Granite Rapids pour serveurs.
Les technologies de fabrication d'Intel seront désormais connues sous les noms d'Intel 7, Intel 4, Intel 3 et, enfin, Intel 20A et 18A. (Crédit Intel)
Intel 3 bénéficiera des optimisations FinFET et d'une amélioration de la lithographie EUV pour apporter une hausse de la performance par watt d'environ 18 % par rapport à Intel 4. Les puces Intel 3, dont les noms ne sont pas encore dévoilés, seront produites au cours du deuxième semestre 2023.
Avec 20A , en route vers L'angström
Intel a également présenté son procédé Intel 20A, qui inaugurera fin 2024 l'ère de l'angström avec deux technologies de fabrication très importantes : RibbonFET et PowerVia. Première nouvelle architecture de transistors chez le fondeur depuis le pionnier FinFET en 2011, RibbonFET marque le passage aux transistors Gate-All-Around (GAA) avec un empilement des couches les unes au-dessus des autres pour une meilleure gestion des flux et du courant électrique. Ce que GAA fait, c'est d'étendre la conception des puces de deux à trois dimensions. PowerVia sera la première implémentation industrielle chez Intel de la fourniture d'énergie sur la face arrière, qui élimine le besoin d'acheminer l'alimentation sur la face avant du wafer et optimise l'acheminement des signaux tout en réduisant le statisme et le bruit.
Ces procédés, dont la montée en puissance est prévue pour 2024, ont suscité l'intérêt de Qualcomm, qui compte passer des commandes à l'entité IFS 2.0 en plus de son fournisseur habituel TSMC. L'autre grand client d'Intel pour ces services de fonderie sera AWS qui compte exploiter les technologies de packaging Foveros Omni et Foveros Direct pour assembler des puces avec des composants hétérogènes (CPU, GPU, Asics...). Foveros Omni assure la partie « désagrégation de matrices » de Foveros et l'étendra verticalement. En gros, cela donnera à Intel plus d'outils pour mélanger et assortir des tuiles, ou des coeurs performance et coeurs basse consommation ensemble à l'intérieur de la même puce en alimentant l'étage du dessus sans passer par celui du dessous. La deuxième technique, Foveros Direct, ajoutera une liaison directe cuivre-cuivre dans les circuits pour une résistance électrique encore plus faible, et donc plus de performances en rapprochant par exemple CPU et GPU dans le die.
Avec RibbonFET, un transistor à largeur flexible avec un certain nombre de couches aide à piloter le courant électrique du transistor. (Crédit Intel)
Enfin, l'Intel 18A, attendue en 2025, est déjà en cours de développement, avec des améliorations apportées au RibbonFET qui permettront de faire un autre saut quant aux performances des transistors, a indiqué le fondeur. Avec 18A, Intel prévoit une utilisation accrue de la lithographie EUV.
Principale métrique : les performances par watt
Cette bataille autour de la dénomination des modes de fabrication repose sur des considérations techniques, non dépourvues d'enjeux marketing. Pendant des années, les géants des puces comme Intel et AMD ont défini l'évolution de leurs produits à travers des noeuds de fabrications : d'abord en termes de microns, puis de nanomètres, comme le processus 14 nm qu'Intel a eu du mal à dépasser. Mais ce qui définit un processus « 7 nm » est devenu de plus en plus abstrait, au point que certains, comme Intel, diraient que le terme est devenu essentiellement dénué de sens. Au lieu de cela, Intel compte aujourd'hui distinguer les noeuds de fabrication avec une nouvelle métrique : les performances par watt.
Reste à connaitre la réaction des concurrents face à cette approche. Pat Gelsinger a toutefois déjà gagné des clients avec cette stratégie. « Les innovations dévoilées aujourd'hui permettront non seulement de mettre en oeuvre la feuille de route des produits d'Intel ; elles seront également essentielles pour les clients de notre fonderie », a expliqué Pat Gelsinger. « L'intérêt pour IFS a été fort et je suis ravi que nous ayons annoncé aujourd'hui nos deux premiers clients majeurs ».
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