Le constructeur canadien espère réduire ses coûts d'exploitation de moitié en supprimant 4 500 emplois et en réduisant son offre de smartphones. Il annonce un recentrage sur le secteur professionnel. Mais la question de son avenir reste posée suite à un avertissement sur résultats d'un milliard de dollars pour son second trimestre 2013.
Blackberry - exRIM- n'est pas sorti d'affaire. Son dernier bilan témoigne de performances économiques médiocres. Les utilisateurs professionnels ont abandonné la plate-forme autrefois dominante. Le constructeur prévoit une perte d'exploitation nette PCGR (Principes comptables généralement reconnus) de 1 milliard de dollars pour le trimestre courant de juillet à septembre sur lequel a pesé les maigres ventes de Z10. Comparativement au même trimestre 2012, le constructeur enregistre des ventes en baisse de 45 %, autour de 1,6 milliard de dollars. Blackberry a vendu environ 5,9 millions de terminaux, mais seuls 3,7 millions de téléphones sont pris en compte sur la période, le reste ayant déjà été expédié aux distributeurs le trimestre précédent.
Conséquence de ces mauvais résultats, l'entreprise envisage une restructuration et le licenciement de 4 500 personnes environ, soit 40 % de son personnel. Elle devrait aussi réduire son offre de terminaux de six à quatre et cibler les marchés d'entreprise et semi-professionnels. « Nous procédons à des changements opérationnels difficiles, mais nécessaires si nous voulons défendre notre place dans un secteur en évolution et plus compétitif, et retrouver de la rentabilité », a déclaré Thorsten Heins, le président et CEO de Blackberry dans un communiqué. « Nous allons recentrer notre offre autour de notre solution de bout-en-bout, hardware, logiciels et services, à destination des entreprises et des utilisateurs finaux professionnels. Nous nous repositionnons ainsi très spécifiquement sur les clients qui ont contribué à faire de Blackberry la marque leader en terme de sécurité, de gestion et de fiabilité en entreprise », a-t-il ajouté.
Une aubaine pour les Windows Phone de Microsoft
Les perspectives de Thorsten Heins sont très optimistes, et de nombreux acteurs du secteur se demandent pendant combien de temps Blackberry pourra survivre dans un marché sans merci. Le constructeur a déjà annoncé qu'il allait évaluer les différentes « alternatives stratégiques », une formule qui laisse souvent pressentir une vente par appartement ou une acquisition par un concurrent. Le système d'exploitation Blackberry 10 a été commercialisé avec plus d'un an de retard laissant partir les adeptes les plus inconditionnels de la marque vers les plateformes concurrentes d'Apple, Google et Microsoft. Avec le rachat de Nokia, ce dernier pourrait bien profiter de la déconfiture de Blackberry pour imposer ses Windows Phone dans les entreprises. L'annonce de vendredi ne va pas beaucoup rassurer les utilisateurs et les investisseurs sur les capacités de Blackberry à retourner la situation à son avantage. Quelques minutes avant l'annonce de vendredi, l'autorité de contrôle des marchés financiers canadien avait suspendu la cotation des actions Blackberry. À la reprise des cours, l'action avait chuté jusqu'à près d'un quart de sa valeur.
L'un des plus grands défis de Blackberry est d'offrir aux consommateurs un vrai motif de se détourner de produits comme l'iPhone et les terminaux Android, très axés apps. « Pour être crédible vis-à-vis de la concurrence, le constructeur a besoin d'un écosystème d'applications plus large. Il doit apporter aux utilisateurs des services mobiles différents de ceux déjà disponibles sur iOS et Android », a déclaré Ramon Llamas, analyste chez IDC. « Blackberry a annoncé qu'il proposerait 4 appareils au lieu de six actuellement, et qu'il se recentrerait sur l'entreprise et les marchés semi-professionnels, mais je pense que le constructeur devrait élargir son portefeuille de produits et proposer plus de fonctionnalités », a estimé l'analyste. Par ailleurs, « Blackberry destine sa nouvelle gamme d'appareils aux utilisateurs finaux professionnels. Mais avec les smartphones et tablettes actuelles, « la productivité est déjà un fait établi », a ajouté Ramon Llamas. Et, Blackberry est désormais totalement absent du marché des tablettes.
Une base clients et des brevets en derniers joyaux
Selon l'analyste indépendant Jack Gold, les ventes de Blackberry pour le trimestre sont presque à la moitié de ce qu'il attendait. « Ils vont avoir du mal à sortir de cette spirale », a-t-il déclaré dans un courriel. « On peut faire face à une perte importante si les ventes sont en hausse. Mais quand on a une perte combinée à une baisse des ventes, la situation devient très compliquée. À ce stade, les actions valent moins qu'avant, de sorte qu'il serait plus facile de les acquérir, mais on ne voit pas très bien qui pourrait être intéressé. L'acquéreur achèterait essentiellement de la propriété intellectuelle et la base installée de clients », a-t-il ajouté. « Ce serait peut-être plus facile de vendre à un investisseur privé, mais encore une fois, qui voudrait financer ? ». C'est le 27 septembre prochain que Blackberry annoncera ses résultats financiers complets pour le deuxième trimestre 2013.
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