En même temps qu'ils étoffent leurs catalogues de logiciels, les industriels de l'impression mettent en place des programmes spécifiques pour les commercialiser, via une partie de leurs partenaires revendeurs, qui va en moyenne de 20 à 30%.
Pourquoi des fabricants d'imprimantes en sont-ils venus à racheter des éditeurs dont les logiciels permettent en théorie d'imprimer moins ? Si la stratégie peut paraître paradoxale, deux exemples montrent que cette industrie savait très bien ce qu'elle faisait et ne s'est pas trompée : non seulement plus personne ne parle de « zéro papier », mais le volume global des impressions dans le monde continue de progresser, malgré ce qui n'est plus imprimé. « On constate que les flux de documents électroniques ne tuent pas l'impression : ils la déportent, généralement vers le client final », explique Magali Descamps, responsable marketing chez HP Exstream.
Exstream est le premier exemple de l'évolution de la distribution des logiciels dédiés au document. La société a été créée aux Etats-Unis en 1998 avec pour vocation de proposer des solutions d'éditique, un terme aujourd'hui peu utilisé qui désignait le segment de la gestion des envois en nombre. Autrement dit, ses clients étaient d'abord ceux qui devaient envoyer des millions de factures ou de relevés de comptes et percevaient que les économies possibles étaient énormes. Logiquement, l'éditeur travaillait principalement avec des intégrateurs et des SSII. En France, son premier client fut ainsi Bouygues Telecom.
En 2008, HP rachète Exstream mais lui laisse son nom et son indépendance, notamment parce que son propre réseau de distribution n'est pas encore prêt pour prendre en charge ces logiciels désormais désignés par l'acronyme CCM (Customer Communication Management). « Cette acquisition permet à HP de bâtir une offre complète pour gérer tous les flux de données non structurées qui circulent dans l'entreprise, soit plus de 80% du total », estime Magali Descamps.
Puisqu'il n'est pas question de faire descendre en gamme Exstream, HP va donc élargir le champ d'action de sa division impression (IPG, pour Image and Printing Group). Dans ce cas, les logiciels d'impression forment le segment du MDS (Managed Document Services). « Notre rôle consiste à accompagner les revendeurs de solutions d'impression vers des projets à valeur ajoutée incluant des logiciels, explique Pascal Genty chez HP IPG. Notre Centre de Compétences Solutions européen peut mettre en rapport nos revendeurs certifiés Partner One avec les intégrateurs ou les SSII qui disposent de la compétence qu'ils recherchent ».
La boucle est ainsi bouclée : les revendeurs et les intégrateurs travaillent ensemble sur la partie « software » des projets.
Le logiciel n'est pas mono marque
Le deuxième exemple concerne Lexmark. En 2010, le constructeur a lui aussi racheté un « pure player » du logiciel dédié à l'impression : Perceptive Software, éditeur créé aux Etats-Unis en 1995. Cette société avait notamment pour elle de disposer d'une importante base installée, surtout aux Etats-Unis, avec plus de 2 500 clients, dont un millier d'hôpitaux, 600 universités ou l'ensemble de l'Etat de Californie (qui imprime à lui seul plus de 150 millions de pages par jour). Là encore, on décide que Perceptive doit monter en gamme, ce qui conduit aux rachats de l'éditeur néerlandais Pallas Athena, spécialisé dans le BPM (Business Process Management) et l'ECM (Enterprise Content Management), et de Brainware, dédié à la capture des données. Dans tous les cas, les partenaires historiques de ces éditeurs sont les intégrateurs et les SSII. « Proposer des logiciels autour de l'impression implique de pouvoir travailler avec toutes les marques, reconnaît Florent Davou, Directeur Général de Perceptive Software pour l'Europe du Sud. Perceptive Software est donc une business unit indépendante qui a son propre réseau de distribution, mais les revendeurs sont de plus en plus nombreux à vouloir prendre le virage du logiciel et nous allons donc multiplier les accords avec des partenaires historiques de Lexmark ».
Dans les deux cas, la convergence entre le matériel et le logiciel passe par un rapprochement des canaux SSII et revendeurs.
Nouvelles cibles : les VAR et les ISV
« L'avenir des logiciels d'impression est de fonctionner avec toutes les marques tout en s'appuyant sur la puissance de prospection d'une marque », résume Gérard Bouhanna, Directeur Général d'OKI France. Et de poursuivre : « nous allons travailler avec un nombre de plus en plus important de VAR métiers et d'éditeurs spécialisés ».
La réflexion est comparable chez Kyocera Mita. « Notre rôle avec le logiciel est d'animer des écosystèmes où l'on retrouve à la fois des bureauticiens, des revendeurs informatiques, des VAR métiers et des intégrateurs, explique Gérard de Carville, directeur du constructeur de systèmes d'impression en France. Le logiciel a effectivement triplé ces deux dernières années au niveau du chiffre d'affaires, mais il arrive seulement à 6%. Le véritable enjeu pour nos partenaires, quels qu'ils soient, ce sont les services générés par la vente de ces solutions. Et nous ne toucheront pas à ces services ».
Qu'en pensent les partenaires concernés ? Ce sera l'objet du 3ème volet de ce dossier.
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