Créé en 2006, le cabinet Selescope est un spécialiste du recrutement dans les TIC. Doit-on craindre une pénurie de candidats à l'embauche si tous les acteurs de la filière lancent simultanément des programmes de recrutement ? L'analyse de Rami Kechteil, associé du cabinet, dont l'effectif est justement passé de 6 à 10 personnes.
Dossier réalisé en collaboration avec
Distributique : Constatez-vous une reprise des offres d'emploi dans le secteur informatique et télécom ?
Rami Kechteil : La reprise des embauches est indéniable et elle est forte, mais elle ne date que du printemps 2010. Par rapport à 2009, l'augmentation est d'environ 25%. Cela étant dit, elle ne suffit pas à compenser l'énorme baisse enregistrée en 2009, année durant laquelle les recrutements de la filière IT ont chuté d'environ 30%. Si l'année 2010 marque une reprise, elle ne permet pas au marché de l'emploi de retrouver tout à fait le niveau qu'il avait en 2008.
Distributique : Certaines compétences ont-elles échappé au recul enregistré en 2009 ?
Rami Kechteil : Sur la base de ce que nous avons vu, quasiment aucune, à l'exception des certaines niches, dont les activités liées au cloud computing, à la virtualisation ou à la sécurité des systèmes d'information. Par ailleurs, on observe que les demandes de 2010 ne portent pas sur les mêmes profils que ceux qui étaient les plus demandés avant 2008. Une des plus fortes progressions concerne ainsi le métier d'architecte des systèmes d'information, qui était encore à l'état embryonnaire voilà quelques années. On devrait donc assister à la « re-formation », pour ne pas dire la « reconversion » d'un nombre croissant de salariés de la filière IT.
Distributique : Les exigences ont-elles également changé en ce qui concerne les commerciaux ?
Rami Kechteil : La principale évolution est logique et peu surprenante : les nouveaux commerciaux doivent permettre de capter davantage de valeur ajoutée. Dans les faits, les fournisseurs de matériels recherchent des commerciaux spécialisés dans les services et les sociétés de services recherchent des consultants. Qu'ils soient « chasseurs » ou « éleveurs », les commerciaux doivent donc être de plus en plus des « account managers », capable de gérer les clients de bout en bout. On ne leur demande pas uniquement de les fidéliser, mais de leur vendre davantage.
Distributique : De nombreuses campagnes de recrutement ont été lancées cet automne, au point que l'on commence à nouveau à évoquer une pénurie de personnels sur le marché IT. Le risque est-il réel ?
Rami Kechteil : Selon moi, il s'agit d'un mythe ; d'un chiffon rouge agité devant les entreprises qui recrutent pour justifier des rémunérations plus élevées. Sur le terrain, la vérité est que le marché du recrutement est cyclique. Durant les périodes « basses », comme ces deux dernières années, les entreprises prennent logiquement davantage de précautions : les processus d'embauche sont plus longs, les entretiens plus nombreux et elles recherchent des candidats aux compétences très pointues disposant d'un solide carnet d'adresses. Au cours des phases « hautes », on voit à l'inverse que les processus se raccourcissent, que les entreprises sont plus ouvertes sur le profil des candidats et que la formation sera peaufinée au sein de l'entreprise. Pour conclure, il ne faut pas avoir la mémoire courte et se souvenir que l'industrie IT a déjà réussi par le passé à contourner le risque d'une pénurie en recrutant des ingénieurs issus d'autres industries, ou encore des commerciaux travaillant dans la banque et l'assurance. Plutôt que de parler de pénurie, on pourrait simplement dire que les salaires d'embauche pour certains profils ont timidement commenceé à remonter...
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